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La construction d'une identité 

La catalanité est représentative de l’ identité sociale de ce territoire. Elle se définit comme une qualité et repose, comme Anne-Marie Thiesse l’a démontré pour la notion d’ identité nationale, sur un discours historique parfois idéalisé, en tous les cas revalorisé à partir d’évènements qui, ici, fondent la nation catalane. Celle-ci trouve son origine à l’époque carolingienne avec Guifré el Pilós. Dès le IXe siècle, l’histoire du Conflent-Canigó est donc intimement associée à celle de la Catalogne. Cet évènement se confond dans le processus identitaire avec un symbole, l’origine des couleurs sang et or : Guifré, prêtant main forte au Roi de France contre les Normands est blessé au cours d’ une bataille. Charles le Chauve reconnaissant sa bravoure, lui offre ses armoiries en apposant quatre doigts trempés de son sang sur son bouclier doré.

L’unité linguistique a précédé l’histoire. Dès le VIIe siècle, la partie nord de la péninsule ibérique présente une base relativement homogène sur laquelle la domination sarrasine, entre les VIIIe et XIIIe siècles, eut peu d’influence. Le premier document littéraire considéré comme rédigé en catalan date de la fin du XIIe – début XIIIe siècles et coïncide avec le début du règne de Jacques 1er d’Aragon dit Le Conquérant (roi d’Aragon en 1213 puis roi de Majorque en 1230). Au XIIIe siècle, des textes juridiques et commerciaux sont rédigés en catalan la langue atteint son apogée à la fin du XVe siècle.

Après une longue crise identitaire, c’est la Renaixença catalana qui fait émerger une langue, des lieux, des figures et des symboles. Ce mouvement culturel apparaît dans le Principat de Catalogne autour de 1830, avec la reconnaissance du catalan comme langue littéraire et l’écriture d’un discours historique. Ce mouvement se retrouve en Roussillon autour de Justin Pépratx (vers 1880) au moment même où l’Ecole Normale appuie, depuis 1876, le processus de décatalanisation avec l’instauration de l’école gratuite, laïque et obligatoire en français. 

Cette identité présente une incontestable unité. À l’exception de Monseigneur Carsalade-du-Pont, gersois d’origine, mais ayant adopté et défendu la culture catalane, il est animé par des personnalités nées dans le Principat de Catalogne, qui deviennent des symboles identitaires des deux côtés de la frontière.

Si le Conflent-Canigó, construction administrative, a une identité homogène, quelques exceptions demeurent : Los Masos est la seule commune dont le nom commence par un article qui n’est pas français ; les communes de Trevillach, Campoussy et Sournia revendiquent leur occitanité. L’existence de la nation catalane était indiscutable à l’époque médiévale ; en Roussillon, l’histoire des derniers siècles questionne cette unité et les facteurs qui la déterminent.

1883 © ILC

Jacint Verdaguer

 

Né en 1845, d’origine paysanne, ce poète est une figure de la Renaixença. En 1886, il publie à Barcelone, en catalan, le poème Canigó inspiré de la montagne éponyme et de la personnalité de Guifré. Dans ce récit épique, il associe un lieu – l’abbaye Saint-Martin du Canigou – et un mythe. Sa rencontre avec l’évêque de Perpignan, Monseigneur Carsalade-du-Pont, est déterminante. Celui-ci achète les ruines du monastère pour les restaurer et le sanctuaire devient, en 1903 avec le rétablissement des Jeux Floraux en son sein, un des symboles de la Renaixença en Roussillon et Catalogne.

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